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La République démocratique du Congo (RDC) doit renoncer aux parcs agro-industriels

April 4, 2019

---POUR DIFFUSION IMMÉDIATE---

April 4, 2019

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Anuradha Mittal
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  • L'effondrement du projet pilote de Bukanga Lonzo montre que les parcs agro-industriels sont une fausse solution aux défis auxquels font face la RDC et l'Afrique en matière d'alimentation, d'agriculture et de réduction de la pauvreté.

  • Le parc a été créé sur des terres prises illégalement aux communautés locales après les avoir trompées sur le projet et son impact.

  • Le projet a abouti à de nombreuses violations des droits humains, de la pollution,  du gaspillage de fonds publics, de sérieuses suspicions de détournement de fonds et de corruption, ainsi qu'à une action en justice contre le pays.

  • La Banque mondiale et la Banque africaine de développement sont les principaux moteurs, architectes et financeurs des parcs agro-industriels, alors que ceux-ci vont à l’encontre des intérêts du pays, de la volonté des agriculteurs et de leurs organisations et sont même contraires à la politique agricole du pays.

Oakland, CA—La mise en place et l'effondrement du projet pilote de parc agro-industriel de Bukanga Lonzo en République démocratique du Congo (RDC) ont donné lieu à d’importantes violations des droits fonciers et des droits humains, de la pollution,  du gaspillage de publics, de sérieuses suspicions de détournement de fonds et de corruption, ainsi qu'à une action en justice contre le pays.

Le nouveau rapport de l’Oakland Institute, Parcs agro-industriels en RDC: Tirer les Leçons de la débâcle de Bukanga Lonzo révèle que les parcs agro-industriels sont une fausse solution aux défis auxquels font face la RDC et l’Afrique en matière d’alimentation, d’agriculture et de lutte contre la pauvreté. « Le gouvernement de la RDC doit renoncer à offrir des terres à des entreprises étrangères pour que celles-ci y créent des parcs agro-industriels. Ce n'est pas un moyen efficace et durable de lutter contre la faim et la pauvreté », a déclaré Frédéric Mousseau, directeur des politiques de l'Oakland Institute et auteur du rapport.

Report cover: Highland scene in Amhara, Ethiopia. Credit: The Oakland Institute

Le parc agro-industriel de Bukanga Lonzo a été créé en 2014 dans le cadre d'un partenariat public-privé entre le gouvernement et une société sud-africaine, Africom Commodities. Il devait utiliser 80 000 hectares de terres pour la production de maïs et d’autres cultures. L'État a dépensé près de 100 millions de dollars d'argent public dans le projet.

Cependant, trois ans après son lancement, le projet s’effondrait en 2017. Africom invoquait les coûts élevés et le manque de fiabilité des plans et des paiements du gouvernement. En juillet 2018, l’entreprise intentait une action en justice contre la RDC pour non-paiement de ses dépenses. Le gouvernement congolais blâme quant à lui Africom pour cet échec.

« Le rapport expose les nombreux problèmes que nous avons identifiés avec le parc. Les terres ont été prises illégalement aux communautés locales après les avoir trompées sur le projet et son impact ; on leur a fait signer des documents qui cédaient leurs terres ancestrales, en violation des droits fonciers et des lois nationales », a déclaré Matthieu Yela Bonketo, coordinateur de l'ONG congolaise Cercle pour la défense de l'environnement (CEDEN).

Les villageois rapportent que la création du parc a entraîné des actes de violence et des violations des droits humains de la part des forces de police, qui auraient entraîné au moins un décès. Le projet a également utilisé de grandes quantités de produits chimiques nocifs, notamment 60 000 litres de glyphosate, menaçant la santé des habitants et les ressources naturelles dont ils dépendent pour leur subsistance. Une découverte surprenante de la recherche est la création d'une société minière en 2015 sous le couvert du parc, qui, loin de l'objectif déclaré de sécurité alimentaire du projet, a été créé pour la prospection et l'exploitation du sous-sol du parc.

Un audit fuité analysé dans le rapport révèle toutes sortes de mauvaise gestion financière de la part de la société sud-africaine et soulève de sérieuses suspicions de détournement de fonds et de corruption. La recherche identifie d’autres problèmes de mauvaise gestion, notamment une partie de la production du parc qui aurait pourri sur place, puis enterrée dans le parc avec des quantités de produits chimiques périmés. « En dépit de toutes ces informations incriminantes, le gouvernement a annoncé son intention de relancer le parc, et de nouveaux parcs sont en construction», a poursuivi Bonketo.

La Banque mondiale et la Banque africaine de développement (BAD) sont les principaux moteurs, architectes et bailleurs de fonds des parcs agro-industriels. Elles colportent l’idée trompeuse que les agriculteurs congolais sont en retard et que l'agriculture doit évoluer vers le modèle industrialisé occidental. Le rapport sur la débâcle de Bukanga Lonzo contredit cette vision et décrit à quoi une politique agricole efficace ressemblerait.

«Il ne s'agit pas simplement d'un projet défectueux, il s'agit d'une stratégie défaillante, conçue et financée par la Banque mondiale et la Banque africaine de développement, qui donne la priorité à l'agriculture industrielle avant les droits, le bien-être et les moyens de subsistance des communautés locales. Le plus choquant est que ce plan va même à l’encontre de la politique agricole de RDC, définie mais jamais mise en œuvre, et de la volonté des agriculteurs et de leurs organisations », a poursuivi Mousseau.

Le rapport est basé sur des recherches de terrain et une étude approfondie du projet. Il exhorte le gouvernement de la RDC, ainsi que la Banque mondiale et la Banque africaine de développement, à tirer les leçons de la débâcle de Bukanga Lonzo et à renoncer aux projets de parcs agro-industriels supplémentaires dans le pays.

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Le rapport et la documentation qui l’accompagne, comprenant la compilation de lettres et de pétitions de communautés locales et de leurs représentants, des copies des « Actes d'engagement » signés par les chefs locaux, l'audit fuité d’Ernest & Young et les statuts de la société minière sont disponible ici.